Quand on choisit le unschooling (ou apprentissages auto-gérés par l’enfant), on fait le pari de la confiance. Confiance en nos enfants, en leur curiosité naturelle et leur capacité à apprendre à leur rythme. Mais il y a un sujet qui cristallise toutes les peurs : la lecture. Lire est si essentiel, que l’on peut vite paniquer en tant que parent, si notre enfant ne lit pas « dans les temps ». Je le sais, car je le vis au quotidien avec mon fils de 10 ans. Il n’a jamais appris à lire comme à l’école et n’est pas encore un grand lecteur autonome. Mais depuis des années, il apprend chaque jour, à sa manière. Dans cet article, je vais vous partager mon cheminement, mes découvertes, mes outils et mon expérience personnelle sur l’apprentissage de la lecture en unschooling !
La lecture en unschooling, de quoi parle-t-on ?
Dans l’apprentissage de la lecture de façon classique, l’enfant apprend à lire (le plus souvent à l’école et à un âge précis) car il le « doit ». Il n’a pas le choix que de suivre les autres (et souvent se comparer à eux) et avancer à un rythme dicté par un enseignant ou un parent (dans le cadre d’une instruction en famille dite « formelle »).
En unschooling, c’est tout le contraire ! L’enfant apprend à lire car il en a « envie », ou bien par besoin ou encore par curiosité. Cela peut prendre plus de temps, ou moins, être linéaire ou semé d’embûches… et c’est ok. L’apprentissage de la lecture en unschooling est une rencontre naturelle entre les mots et l’enfant. Il n’y a pas de programme à suivre ! C’est un apprentissage dans un contexte de liberté, de plaisir et surtout de sens. C’est donc un processus vivant, ancré dans la réalité et les intérêts de l’enfant.
Quelles sont les bases naturelles de l’apprentissage de la lecture ?
Avant même de savoir lire, les enfants baignent dans le mode du langage. Ils écoutent des histoires, posent des questions, retiennent des comptines, etc. Tout cela prépare naturellement le terrain pour la lecture, sans avoir besoin de forcer.
En unschooling, on continue dans ce sens ! On aborde la lecture au sein d’un environnement riche et stimulant. Il n’y a pas de programme imposé ni d’âge conseillé. Un enfant peut s’intéresser à la lecture très tôt, vers 3-4 ans ou bien très tard, à l’adolescence. Il ne s’agit pas de laisser son enfant dans un coin… mais de l’imprégner des mots jusqu’à ce qu’il ressente le besoin d’apprendre.
Comment mon fils a appris à lire en mode unschooling ?
Mon fils s’est très tôt intéressé aux mots qu’il voyait partout ! Pas facile pourtant quand on a une vie nomade, car il n’a pas forcément vu des mots « français » en premier. D’ailleurs, au niveau du langage (il avait 2 ans quand nous sommes partis), il a mélangé un peu toutes les langues au début (italien, espagnol et français notamment). Il a parlé « bien » très tard, à plus de 3 ans. Mais il avait d’autres choses à gérer aussi entre-temps (je sais aujourd’hui qu’il a un trouble neuroatypique). Il avait donc 3-4 ans quand il s’est intéressé aux mots et aux lettres. Je lui ai alors proposé les Alphas (les petits figurines seulement et quelques jeux). Il a vite assimilé le son de chaque lettre, tout en jouant !
Il a donc su très tôt lire des syllabes et des mots simples. Puis, il s’est désintéressé complètement de la lecture par la suite ! Il ne voulait pas aller plus loin car il n’en voyait pas l’intérêt. J’ai tout de même continué à enrichir son environnement. Il adore depuis toujours que je lui lise des histoires le soir et on fréquente des bibliothèques partout dans le monde. Bon, avec une maman qui vit de sa plume et deux grandes sœurs qui lisent beaucoup, il a aussi des modèles avec lui 🙂
Il s’est longtemps amusé à lire les mots sur les pancartes ou les emballages (pas toujours en français d’ailleurs). Je savais qu’il connaissait tous les sons, mais il ne voulait pas lire. Finalement, c’est à l’âge de 9 ans 1/2 qu’il est revenu vers la lecture (donc depuis très récemment). Pourquoi ? Par envie de pouvoir lire des BD mais aussi les consignes de ses jeux vidéos ! Il m’a demandé de l’aide. J’ai donc acheté des « Sami et Julie » niveau CP. Et là, en trois mois, alors qu’il ne connaissait aucun sons complexes (« ou », « oi », « euille », etc.), il a lu ces livres avec moi. Au départ, il s’est senti frustré car il voulait lire de suite de façon fluide. Mais il a continué avec plaisir ! Aujourd’hui, à 10 ans, il arrive à lire des courts textes et des petits romans, même dans sa tête. Il n’a certainement pas le « niveau » d’un enfant de 10 ans qui va à l’école. MAIS il a appris seul, avec envie et plaisir ! Et il progresse de jour en jour de façon spectaculaire.

Comment lâcher prise et faire confiance dans les capacités de nos enfants ?
Alors, vous vous posez sûrement la question de savoir si je n’ai pas eu peur à un moment donné que mon fils ne sache jamais lire ? Eh bien, je n’ai pas été sereine tout le temps, je l’avoue. Même moi qui prône le unschooling et suis persuadée des bienfaits de cette méthode ! Et c’est normal, en tant que parent qui a été scolarisé et qui n’a connu que ça, d’avoir des doutes. Mais pourtant, je l’ai laissé faire (le fait de ne pas avoir de contrôles de l’EN est aussi un avantage) et je lui ai fait confiance. Après tout, s’il ne savait pas lire à 7 ans, était-ce bien grave ? Et s’il apprend à lire à 15 ans, mais en quelques mois seulement… n’est-ce pas fabuleux aussi ?
Quand notre enfant ne lit pas à 6, 7, 8, 9 ou même 10 ans, la peur peut arriver. Nous avons peur d’être jugés, d’avoir “raté quelque chose”, de mettre notre enfant en difficulté, qu’il “prenne du retard” (mais par rapport à quoi ?). Ces peurs sont légitimes (Nous avons grandi dans un système qui valorise la norme, les étapes, les bulletins, les cases). Mais en unschooling, on choisit un autre chemin, celui de la confiance. Faire confiance à son enfant, c’est croire qu’il est capable d’apprendre, même (et surtout !) s’il le fait différemment. C’est accepter que l’apprentissage ne soit pas linéaire, ni prévisible. C’est voir les petits signes, les graines invisibles qui germent en silence.
Il s’agit donc d’accompagner sans diriger, d’observer sans évaluer et d’offrir, sans attendre de résultat immédiat.
Et parfois, cela implique aussi de travailler sur soi : sur ses propres angoisses, ses attentes, ses blessures d’école. Parce que l’apprentissage de nos enfants vient souvent réveiller nos propres histoires…
Quelles sont mes astuces et outils qui pourraient vous aider ?
Voici une liste d’astuces et d’outils qui vont vous aider à accompagner votre enfant sur la voie de la lecture en unschooling :
- Tout d’abord des livres, qui vont vous aider à déconstruire le schéma classique imprimé en vous : Je vous conseille de lire les livres de Peter Gray (Libre pour apprendre) et d’André Stern (Et je ne suis jamais allé à l’école).
- Laisser traîner des livres (sans rien attendre en retour) : Votre enfant peut ainsi regarder les images, feuilleter, vous demander de lui lire un passage ou le livre en entier, etc. Essayez de varier les livres, en allant à la bibliothèque par exemple et dès le plus jeune âge.
- Les livres audio et les podcasts : C’est une porte d’entrée vers la lecture pour les enfants qui rejettent (pour l’instant) les livres. Ils peuvent écouter les histoires seuls, imaginer, vivre des aventures, développer la compréhension narrative et enrichir leur vocabulaire. Mon fils adore les podcasts de Radio France (il écoute même des documentaires sur les animaux, l’histoire, etc.).
- Le son des lettres : J’ai toujours appris à mon fils le son de chaque lettre et pas leur nom. Par exemple, « fffff » pour la lettre F et non « èfe ». Cela facilite grandement l’apprentissage de la lecture car il n’a plus qu’à associer les sons.
- Les albums illustrés, les BD et mangas : Peu de textes et beaucoup d’images, cela rassure les enfants « petits lecteurs ».
- Les jeux de lettres : Que ce soit sur des applis ludiques ou via des jeux de société, les jeux avec des lettres permettent d’aborder la lecture tout en s’amusant !

- La lecture partagée : Lire à voix haute, ensemble, sans insister et juste pour le plaisir. Cela permet aussi de « débloquer » des mots compliqués à lire pour l’enfant. C’est comme accompagner un enfant à faire du vélo seul sans roulettes… on le tient d’abord, on le rassure et le seconde, puis il se lâche complètement !
- Quelques idées à consulter (mais pas à imposer à l’enfant) :
- Les Alphas
- Apili
- Sami et Julie
- Le site de Céline Alvarez
- Des romans et livres dans la thématique préférée (du moment) de votre enfant ! C’est notamment grâce à sa passion pour Minecraft que mon fils s’est mis à lire (et merci à son ami A. qui lui a fait découvrir les romans de Minus basés sur l’univers de Minecraft) 🙂
Apprendre à lire sans école, sans méthode, sans timing imposé ? Oui, c’est possible. Et c’est même souvent plus riche, plus profond, plus ancré dans la vraie vie ! Chaque enfant est unique. Certains lisent à 4 ans, d’autres à 11. Ce qui compte, ce n’est pas quand ils apprennent, mais comment ils vivent cette découverte : avec plaisir, curiosité, confiance… ou avec stress, comparaison et peur de ne pas être “assez”. Dans notre famille, le chemin de la lecture en unschooling n’est pas terminé. Il est en cours, en mouvement, plein de détours et de surprises ! Si votre enfant ne lit pas encore, rappelez-vous : il n’est pas en retard, il est en chemin. Et si vous voulez partager le parcours de votre enfant, pour ce qui concerne son apprentissage de la lecture, n’hésitez pas à le faire dans les commentaires !